En baisse, les pratiques de torture persistent en Tunisie
L'Organisation tunisienne de lutte contre la torture indique dans un rapport inédit qu'elle a relevé 153 cas de torture dans les prisons et les maisons d'arrêt en Tunisie en 2016. Une baisse d’environ 40% par rapport à l’année 2015, même si cela reste « 153 cas de trop ».
« Le nombre des cas de torture enregistrés en Tunisie a nettement baissé depuis 2015 même si les abus persistent notamment dans les prisons et les centres de détention », a indiqué mercredi 22 février l'Organisation contre la torture en Tunisie (OCTT), présidé par la juriste et opposante historique Radhia Nasraoui.
L'ONG fait état de 153 cas enregistrés entre janvier et novembre 2016. « Cela est à comparer à l'année précédente, où nous avions enregistré 250 cas », a précisé à la presse Mondher Cherni, secrétaire général de l'OCTT. La recrudescence de la torture en 2015, année noire du retour aux pratiques policières barbares, s’explique par l’après attentats meurtriers du Bardo et de Sousse cette année-là, où l’exécutif a visiblement donné carte blanche pour délier les mains des enquêteurs.
Retour à des pratiques de l’ancien régime
Le 15 février, l’Observatoire des droits et libertés publiait une série de témoignages vidéo d’accusés remis en liberté dans le cadre de ces affaires et rapportant le retour des pratiques dites de la position du poulet rôti et de l’électrocution que l’on pensait révolues.
Dans son rapport publié mercredi, l'OCTT précise que ces abus se déclinent entre l’arrestation arbitraire (59% des cas), les mauvais traitements (33%), la torture (4%), la mort suspecte (2%), et la menace de viol ou tentative de viol (2%).
La police arrive largement en tête des corps des forces de l’ordre qui commettent ces violations à l'encontre des détenus avec un taux de 62%, suivie par les agents pénitentiaires (24%) puis la Garde nationale avec 14%, ajoutent les auteurs du rapport. « Jusqu'à ce jour, il n'y pas eu une réforme réelle et concrète au sein des institutions sécuritaires et pénitentiaires", soulignent-ils.
La présidente de l'OCTT a pour sa part appelé à « une révision des lois pour que la torture diminue », tout en appelant les partis politiques à se saisir du sujet : qu'ils soient au pouvoir ou dans l'opposition, doivent exposer la question des violations et des droits humains ».
L'an dernier, un groupe d'experts de l'ONU avait jugé que la Tunisie était "sur la bonne voie" en matière de lutte contre la torture, tout en déplorant la persistance de cas. Mais le rapport présenté par l’Organisation de lutte contre la torture en Tunisie abonde plutôt dans le même sens des déclarations d’Avocats Sans Frontières ainsi que du rapport accablant d’Amnesty International et l’ONU qui avaient récemment épinglé la Tunisie pour les multiples violations des droits humains qu’ils avaient pu enregistrer.
S.S