Le taux de chômage des diplômés du supérieur a doublé en 12 ans
Le taux de diplômés du supérieur au chômage en Tunisie est passé de 15% en 2005 à 31% au cours des cinq dernières années, révèle une étude sur « l’enseignement supérieur, entre transmission du savoir et exigence de l’employabilité » réalisée par le bureau d’études Sigma Conseil et la fondation allemande Konrad Adenauer. Selon l’Institut national de la statistique (INS) la Tunisie comptait 632.500 chômeurs au 1er trimestre 2017. Des chiffres qui ne plaident pas en faveur du gouvernement Chahed, au pouvoir depuis août 2016, mais en difficulté notamment à Tataouine où une délégation gouvernementale a dû interrompre précipitamment hier jeudi une visite de terrain.
« La probabilité de chômage des diplômés du supérieur est supérieure à celle de la main d’œuvre active en général », a déclaré le PDG Sigma Conseil, Hassan Zargouni, lors de la présentation des résultats de l’étude lors d’une conférence débat organisée hier jeudi à Sfax, capitale économique du sud tunisien.
L’étude montre le grand décalage dans la situation actuelle entre la nette augmentation du nombre d’étudiants inscrits à l’Université tunisienne et les perspectives d’employabilité des diplômés.
Les chiffres indiquent en effet une nette hausse du nombre d’étudiants inscrits dans les universités privées entre 2001 et 2015 ainsi qu’une augmentation du pourcentage de jeunes femmes parmi les diplômés du supérieur (66.5%), deux fois plus nombreuses que les étudiants de sexe masculin (33.5%).
L’étude met l’accent sur deux axes majeurs : la non-adaptation de la formation universitaire actuelle avec les besoins du marché de l’emploi, et les craintes quant à l’avenir de l’enseignement supérieur public face à la montée du privé. Elle souligne malgré tout que le taux de satisfaction de la formation universitaire est de 60%, contre 40% d’insatisfaits.
Holger Diecks, de la fondation Konrad Adenauer, a pour sa part affirmé que le taux de chômage à la sortie de l’université ne représente à titre de comparaison que 1% en Allemagne, et que le taux de diplômés du supérieur ne dépasse pas les 27% de la population totale.
Il a recommandé de ne pas s’arrêter au volet académique et de privilégier également les stages et le travail partiel en entreprise, ainsi que d’opter pour des formations professionnelles complémentaires, ainsi que l’apprentissage des langues étrangères.
Présent également, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique Selim Khalbous a reconnu que les chiffres révélés par cette étude montrent l’ampleur du chantier qui attend son département et l’importance des travaux de réforme à entreprendre. Il a en outre fait remarquer que les six dernières années n’ont pas enregistré de projets ou d’actions concrètes en faveur de l’Université tunisienne.
Khalbous a par ailleurs imputé l’échec de l’Université tunisienne en termes d’employabilité lors des 20 dernières années à son manque d’ouverture sur son environnement économique et à l’absence de la culture et de la création.
Le budget de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique ne dépasse pas actuellement 4.2% du budget total de l’Etat. Il est réparti sur 204 établissements d’enseignement supérieur public qui accueillent quelques 300 mille étudiants.
En déplacement hier 27 avril à Tataouine, gouvernorat aux prises avec des sit-in géants réclamant de l’emploi depuis bientôt un mois, Youssef Chahed n’a pu promettre concrètement qu’une soixantaine d’emplois dans le secteur pétrolier pour les jeunes de la région.
S.S