Adama Traoré : une expertise confirme la mort par asphyxie

 Adama Traoré : une expertise confirme la mort par asphyxie

Marche à Beaumont-sur-Oise le 22 juillet 2016


« La mort de Monsieur Adama Traoré est secondaire à un état asphyxique aigu, lié à la décompensation – à l’occasion d’un effort et de stress ». C’est la conclusion d’une expertise réclamée par la famille du jeune homme, décédé lors de son interpellation en juillet 2016, selon Le Parisien qui a eu accès aux conclusions médicales. Toutefois, il reste à déterminer les causes de cette asphyxie.


Près d’un an après ce drame, qualifié de « bavure » policière par l’entourage et qui avait entraîné plusieurs nuits de violences à Beaumont-sur-Oise et ses environs dans le Val-d’Oise, ces conclusions viennent confirmer l’autopsie et la contre-expertise réalisées en juillet 2016 par un collège d’experts de l’Institut médico-légal de Paris qui avaient déjà toutes deux conclu à une mort par « syndrome asphyxique ».


Le jeune homme de vingt-quatre ans, mort le 19 juillet 2016 lors de son interpellation par des gendarmes. Si le professeur Jean-Patrick Barbet et le docteur Pierre Validiré, qui ont procédé à la dernière l’expertise, n’ont pas établi avec précision les causes de l’asphyxie fatale, leurs conclusions mettent en défaut la thèse de l’ancien procureur de Pontoise, Yves Jannier.


 


La thèse du procureur de nouveau contredite


Le magistrat du parquet, aujourd’hui avocat général près de la Cour d’appel de Paris, déclarait le 21 juillet dernier qu’Adama Traoré « avait une infection très grave », « touchant plusieurs organes ». L’examen de prélèvements réalisés sur le cœur d’Adama Traoré mettait « en évidence un ensemble de lésions compatibles avec une cardiomyopathie hypertrophique qui est potentiellement la cause directe de la mort », affirmait-il à l’époque. Ce dernier rapport écarte une nouvelle fois l’existence de « lésions d’allure infectieuse » mentionnées dans l’autopsie et mises en avant par les autorités à l’époque. Une attitude prenant le parti des gendarmes qui avait attisé la colère des proches de la victime.


Une nouvelle expertise a été acceptée par les juges d’instruction parisiens chargés du dossier, depuis le dépaysement de l’enquête à Paris en janvier dernier. Néanmoins, la question de savoir si Adama Traoré est mort par asphyxie suite notamment à une fragilité cardiaque ou à une compression thoracique lors de l’intervention des gendarmes, ou à ces deux facteurs cumulés, « n’est pas tranchée » à ce stade des investigations, estime une source proche du dossier.


 


Bavure ?


L’avocat de la famille Traoré, Yassine Bouzrou, est moins nuancé au micro d’Europe 1: « Contrairement aux allégations médiatiques du procureur de la République de Pontoise de l’époque, M. Adama Traoré souffrait d’aucune infection et donc nous pouvons affirmer clairement l’hypothèse de la famille, à savoir des violences volontaires ayant entraîné la mort. Nous espérons donc que les trois juges d’instruction saisis en tireront toutes les conséquences en poursuivant les gendarmes qui font l’objet d’une plainte ». « Une des causes possibles de la mort, c’est le placage ventral des gendarmes qui contribue à une compression thoracique », ajoute l’avocat de la partie civile. La contre-autopsie réalisée fin juillet ne montrait quant à elle « aucune trace de violence ».


Lors de son arrestation, sous des températures caniculaires, le jeune homme âgé de 24 ans avait été maintenu au sol sous « le poids des corps » des trois gendarmes, selon une source proche de l’enquête citant les déclarations de l’un des militaires. Jusqu’ici, les trois gendarmes ont seulement été entendus en tant que témoins. Une autre interrogation porte sur les secours prodigués à Adama Traoré lors de son interpellation. Alors qu’il avait fait part à ce moment-là de difficultés respiratoires, selon l’un des gendarmes auditionnés, il aurait été mis en position latérale de sécurité par les militaires. Ces déclarations des gendarmes ont pourtant été contredites par le témoignage d’un sapeur-pompier arrivé après le malaise d’Adama Traoré, lequel estime que le jeune homme était « face contre terre, sur le ventre, mains dans le dos menottées ».


Rached Cherif


(Avec AFP)