Projet de loi « Asile et immigration » : une loi superflue ?

 Projet de loi « Asile et immigration » : une loi superflue ?

Contre la loi « Asile et immigration »


A quelques jours de l’examen du projet de loi « Asile et immigration » à l’Assemblée nationale, les acteurs de l’asile ont confirmé leurs nombreuses réserves.


Convergence


Entre mi-février et mi-mars dernier, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) était entrée en grève pour contester le projet de loi « Asile et immigration ». Depuis, la grève a été suspendue mais la mobilisation contre cette potentielle future loi continue, différents acteurs de l’asile ayant rejoint la CNDA.


Mercredi soir (11 avril), tous ces acteurs étaient réunis à la même table lors d’une soirée-débat : « Nous avons constaté que beaucoup d'acteurs disaient les mêmes choses mais pas souvent ensemble. C'était l'occasion d'acter la convergence » se félicitait Delphine Lecombe, rapporteure et membre de l’intersyndicale de la CNDA.


Loi inutile ?


Le projet de loi vise à rendre le droit d’asile plus effectif en réduisant les délais de recours des demandeurs d’asile devant la CNDA, mais aussi en réduisant les délais de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). En 2017, l’OFPRA a traité 115 000 demandes.


Un officier effectue une moyenne de deux entretiens par jour avec les demandeurs d'asile. Une nouvelle réduction des délais signifierait des entretiens plus courts et donc une moins bonne évaluation dont les conséquences peuvent être vitales :


« Si en 2015 une loi était utile pour réduire les délais de l'OFPRA qui étaient excessivement longs, il parait aujourd'hui indécent de vouloir faire passer le délai de trois à deux mois. Nous prenons des décisions qui impactent la vie des gens » s’indigne Laurène Dubois, officier de protection (OFPRA) et membre du syndicat Asyl.


Cette dernière a d’ailleurs tenu à préciser qu’elle s’exprimait en tant que syndicat et non en tant que représentante de l'OFPRA.


La langue


Autre problématique soulevée, le fait que le projet de loi puisse modifier la définition de la langue.


Une question primordiale puisque les demandeurs d’asile ne maîtrisent pas forcément, dans la plupart cas, la langue française. Ce qui constitue une difficulté supplémentaire pour faire le récit de leur parcours ou tout simplement se défendre.


Pour Me Férielle Kati, avocate au barreau et membre de l’association ELENA, le projet de loi risque de pénaliser encore plus les demandeurs :


« Il fait désormais état d'une langue dont il [le demandeur d’asile, ndlr] a une connaissance suffisante (…) on imagine bien qu'ils ont pensé aux personnes originaires d'Afrique francophone. On va considérer qu'en français ils se débrouillent et on va essayer de comprendre des choses qui relèvent de l'intime ». La question de l’obtention d’un interprète devenant ainsi secondaire…


A l’approche des débats à l’Assemblée nationale, concernant le projet de loi « Asile et immigration » (16 avril), les mobilisations et manifestations vont se multiplier (notamment le 15 et le 16 avril). La balle sera désormais dans le camp des parlementaires…


Charly Célinain