Aubervilliers. CDC habitat refuse de nommer une résidence étudiante Maurice Audin, militant de l’indépendance algérienne
Dans un communiqué, la municipalité communiste d'Aubervilliers (93) juge "inadmissible" le refus de la CDC Habitat, une filiale immobilière de la Caisse des dépôts, de nommer une résidence étudiante Maurice Audin, du nom de ce grand militant de l'indépendance algérienne.
Pour expliquer son choix, le premier bailleur de France à déclaré que la "CDC habitat souhaitait s’astreindre à des noms dépolitisés et consensuels".
Une justification qui n'a pas convaincu la mairie PC. "Il s’agit là d’un argument de circonstance. C’est ignorer tout d’abord que des noms deviennent consensuels parce que des choix politiques ont conduit à les mettre en avant. Nelson Mandela serait resté un terroriste dans l’opinion internationale si des actrices et acteurs privés et publics, partout dans le monde, n’avaient pas brandi son nom comme étendard de la liberté", rappelle la municipalité de gauche. Avant que celle-ci ne s'interroge sur les vraies raisons d'une telle décision, voyant d'abord dans ce refus un choix politique.
"La CDC habitat établit des différences de traitement incompréhensibles. Comment justifier l’appellation de la "Résidence Maurice Denis " située dans la ville du Raincy, du nom d’un peintre antidreyfusard, proche de l’Action Française et promu par le Régime de Vichy ? Dans ces conditions, où la CDC habitat place t-elle le curseur du « consensuel »?", s'interroge-t-on au sein de la mairie d'Aubervilliers.
Le 11 juin 1957, en pleine bataille d’Alger qui oppose les parachutistes français aux indépendantistes algériens du FLN, Maurice Audin, 25 ans, est à son domicile algérois avec son épouse et leurs trois enfants quand des parachutistes français font irruption chez eux et procèdent à son arrestation.
Le mathématicien, militant communiste anticolonialiste, est soupçonné d’héberger des membres de la cellule armée du Parti communiste algérien. Plusieurs jours après son arrestation, des militaires informent Josette Audin de la prétendue évasion de son mari lors d’un transfert. Convaincue que Maurice Audin a été tué par l'armée française, son épouse porte plainte contre X pour homicide.
En 1958 est publiée une enquête de l'historien Pierre Vidal-Naquet (L'affaire Audin) qui démontre qu'il n'y a pas eu d'évasion : Maurice Audin est bien mort alors qu'il était aux mains des parachutistes français. Malgré les preuves, il faut attendre juin 2014 pour que François Hollande, alors président de la République, reconnaisse que Maurice Audin ne "s’est pas évadé" et qu'il est bien "mort durant sa détention".
Son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, n'avait jamais répondu au courrier de Josette Audin… En février dernier, deux députés, Cédric Villani (LREM) et Sébastien Jumel (PCF) ont demandé à Emmanuel Macron, "la reconnaissance officielle" de son assassinat par l’armée française. Plus de 60 ans après son assassinat, les proches de ce grand militant de l'indépendance algérienne attendent toujours…
Nadir Dendoune