Rencontres de Gindou : un festival de cinéma pas comme les autres
On peut noircir des dizaines de pages pour tenter de raconter le festival de cinéma de Gindou, le plus ancien de la région Midi-Pyrénées, mais il faut aller sur place pour vraiment se rendre compte de la magie du lieu. La 34 ème édition s'est achevée ce dimanche 26 août. Cette année, sa fréquentation a dépassé les 20 000 spectateurs, un public venant de la France entière.
Gindou, c'est ce petit village du Lot (46) de 300 habitants, à une demi-heure de Cahors, et à deux heures de Toulouse, qui se transforme pour une semaine en capitale mondiale du cinéma.
La programmation y est très éclectique : il y a de tout, pour tous les goûts : des courts et des longs métrages, de la fiction, en passant par des documentaires, il y a aussi des dessins animés pour les plus petits.
Festival de cinéma de Gindou (18 au 26 août 2018). Photo: Nelly Blaya
"Nous recevons de plus en plus de films", explique ravie Marie Virgo, une des responsables du festival. "En tout, nous avons reçu 653 films (courts et longs) parmi lesquels on en a sélectionné 37. Les autres, on les avait vus ailleurs", continue celle qui en est à son 29e festival.
Pendant une semaine, une centaine de films est projetée, répartie dans trois sélections : une rétrospective des films d’un auteur, qui devient le parrain de l’édition (cette année c'était Jean-François Laguionie), les Vagabondages Cinématographiques (des courts et longs métrages, de fiction ou documentaires, tous récents et certains inédits) ; et des films du patrimoine proposés par La Cinémathèque de Toulouse.
En parallèle de toutes ces projections, le public peut assister quotidiennement aux discussions avec les invités (les tchatches de 17h), ou les apéros concerts de 19h …
La particularité du festival de Gindou tient au fait que plus de la moitié des projections sont gratuites. "Nous y tenons dur comme fer. C'est un de nos principaux engagements", confirme Marie Virgo. Chaque soir, à la tombée de la nuit, des séances en plein air ouvertes à tous ont lieu dans le cinéma de verdure, un lieu unique en Europe.
Les autres films sont projetés à L'Arsenic, une salle flambant neuve. "Avant, c'était sous un chapiteau. Là, c'est maximum confort : il y a la climatisation, des fauteuils, un super son", précise encore avec fierté la responsable.
Rencontres Cinéma de Gindou (18 au 26 août 2018). Photo: Nelly Blaya
Plus qu'un festival, Gindou est un endroit où le temps semble suspendu. On y croise du monde. Toute la France. Toutes les classes sociales, toutes les origines. "A Gindou, il n'y a pas d'espace VIP, ou de prix du meilleur film. Tout le monde, public et équipes du film, sont logés à la même enseigne", lâche fièrement Marie Virgo.
"J'y suis venu la première fois en 2011 et depuis j'y reviens chaque année même si je ne présente pas de films", nous confie enthousiaste Hakim Zouhani, réalisateur, originaire d'Aubervilliers (93) qui s'est fait connaître avec un premier long métrage "Rue des cités" (qu'il a coréalisé avec sa compagne Carine May), un film sélectionné à Cannes.
C'est sur La Croisette qu'un des programmateurs de Gindou lui propose de venir. "A l'époque, je ne connaissais pas ce festival. J'ai été happé dès mon arrivée. Ici, je ne viens pas juste voir des films, je viens me ressourcer. Je viens passer du temps avec des gens que j'aime", explique le quarantenaire, papa de deux enfants qui est venu en famille.
Sept ans après sa première visite, Hakim a l'impression d'être "chez lui" à Gindou. "Nous pourrions nous installer ici. Car au delà du festival, c'est la région que nous aimons. Culturellement, ça bouge beaucoup", insiste Carine, sa compagne.
En 2011, le couple rencontre Jacky, qui fut longtemps le photographe officiel du festival à Gindou. "On a eu un coup de foudre amical, lance Jacky. C'est ce que permet Gindou : rencontrer des gens de tous les horizons. La particularité de ce festival c'est qu'ici personne ne se prend au sérieux. Les responsables ont installé un lieu unique où on boit, se restaure, et comme il n'y a ni bar ni commerce à Gindou, tout le monde est ensemble", commente une des mémoires vivantes du festival, qui a assisté à toutes les éditions.
Autre particularité de ce festival, l'association Gindou cinéma a mis en place La ruche, un dispositif qui permet à des jeunes auteurs autodidactes, de moins de 31 ans de bénéficier d'une résidence dans trois festivals différents (Gindou Bordeaux et Villeurbanne) pour développer l'écriture d'un scénario de court métrage.
Achraf Ajraoui est lauréat de l’édition 2016. Il a présenté "La Hchouma", son court métrage, il y a quelques jours à Gindou. "Nos films ont bien été reçus par le public. L'accueil ici est juste incroyable. Les gars du village se mettent en quatre pour qu'on se sente bien. Ici, les gens sont plus détendus, ils se mélangent plus facilement qu’ailleurs. C’est la magie de Gindou. Ils sont même fiers de nous recevoir", lâche le jeune homme.
Enricka Moutou et Djigui Diarra également lauréats de La Ruche sont du même avis. Ils ont fait la route avec Achraf depuis Paris et ils sont repartis ensemble pour la capitale dimanche. "On devait rester 3 jours. On est resté jusqu'au bout. Une fois sur place, on ne peut plus repartir", confirment-ils. Pour continuer à profiter du festival, ils ont été logés à quelques kilomètres de Gindou.
"Je me suis lié d'amitié avec Christiane et Jean-Jean en 2016 et ils ont proposé de nous héberger nous trois. Je vous le répète : les gens ici sont exceptionnels", insiste Djigui. "Oui, les festivaliers sont chaleureux, l'atmosphère du festival familiale…Ça favorise et encourage les échanges" ajoute Enricka dont le court métrage développé dans le cadre de La Ruche est actuellement en cours de production.
Hakim, Achraf, Carine, Djigui et Enricka ont déjà promis d'être de nouveau là en 2019.