Funérailles de Saïd Ghozlani sur fond de grande tension

 Funérailles de Saïd Ghozlani sur fond de grande tension

A gauche


Le terrorisme a franchi en Tunisie un nouveau palier dans l’audace et l’impunité. Le braquage d’une agence bancaire à Sbiba (gouvernorat de Kasserine) et les coups de feu qui ont blessé mortellement dans la même région Khaled Ghozlani, frère du militaire Said Ghozlani lui-même assassiné 2 ans auparavant, ont été commis par un groupe djihadiste armé composé de 12 personnes. Tous sont encore en fuite.



 


Les premiers éléments de l’enquête révèlent que les 12 membres armés sont descendus des montagnes limitrophes de la ville de Kasserine, précise Sofiène Selliti, porte-parole du Pôle judiciaire antiterroriste.


 


Une opération commando sophistiquée


Quatre d’entre eux avaient préalablement pris d’assaut une maison à proximité de Jebel M’ghilla et séquestré les membres d’une famille avant de les relâcher. Ils se sont ainsi préalablement emparés d’un véhicule tout-terrain appartenant à l’un des habitants de la région et l’ont utilisée dans le hold-up.


Selon Selliti, cinq autres membres du groupe armé ont utilisé le véhicule dérobé pour le braquage de l’agence bancaire dans la ville de Sbiba. Quatre d’entre eux ont attaqué la banque alors que le cinquième s’est chargé de la surveillance des lieux. Les braqueurs ont terrorisé les agents de l’agence bancaire, détruit les caméras de surveillance et mis la main sur un butin considérable pour les régions intérieures de 320 mille dinars (environ 100 mille euros) en monnaie nationale et en devises.


S’agissant ensuite de l’assassinat de Khaled Ghozlani, Selliti explique qu’en prenant la fuite après le hold-up, le groupe armé, visiblement missionné pour une vengeance macabre, s’est directement dirigé vers la maison du martyr Saïd Ghozlani à Douar Khraifia dans la localité de Thamed à proximité de Jebel M’ghilla où il a ouvert le feu sur Khaled Ghozlani.


Le parquet près le Pôle anti-terroriste s’est saisi du dossier des deux opérations et a confié à l’unité nationale de recherche dans les crimes terroristes d’El Gorjani l’enquête sur les circonstances entourant cette affaire. Une opération qui met dans l’embarras le gouvernement Chahed qui promet que les assaillants « seront retrouvés et punis » et qu’entre temps la famille des deux défunts sera dédommagée.  


 


Règlement de compte


Hier dimanche on apprenait que le dénommé Montassar Ghozlani, l’un des terroristes présumés impliqués dans l’assassinat de Khaled Ghozlani, le frère du soldat martyr, Saïd Ghozlani, ne serait autre qu’un cousin des deux martyrs. Un cousin qui aurait donc choisi le côté obscur en choisissant non seulement de rejoindre les rangs des djihadistes locaux, mais d’assassiner personnellement un membre de sa famille, en guise de représailles.  


Le tout à Douar Khrayfia, de la localité Thamad, délégation de Sbiba, au gouvernorat de Kasserine, où règne toujours un climat pseudo tribal, expliquent des témoins.


Le second martyr des Ghozlani a été inhumé dimanche après-midi, au cimetière de Thamed au milieu d’un dispositif sécuritaire et militaire imposant, et en présence des membres de sa famille et de ses proches ainsi que d’un grand nombre d’habitants de la région qui réclament justice à l’Etat.


 


Colère des habitants


Présents à ces funérailles tendues, ces habitants de la région ont dénoncé « l’indifférence des autorités régionales et nationales à l’égard des habitants des régions limitrophes des zones frontalières avec l’Algérie voisine, des zones pourtant considérées comme tampons militaires, plus particulièrement la localité de Khrayfia jadis souvent confrontée à de sérieuses menaces.


Les riverains réclament le déploiement de patrouilles sécuritaires et militaires dans la région pour les protéger contre le péril terroriste qualifié d’« omniprésent » alors que les autorités se prévalaient de l’avoir éradiqué.


Les mêmes locaux ont jugé indispensable de garantir une source de revenu permanente à la famille du martyr et de lui fournir un nouveau logement, loin de la région, de sorte de protéger ses enfants restants.


Le gouverneur de Kasserine, Samir Boukadida, a pour sa part annoncé son intention de prendre « toutes les mesures nécessaires » au profit de la famille du martyr. Il s’agit notamment de garantir une source de revenu permanente à son épouse et à ses sept enfants.


Commentant cette tragédie, toujours dimanche, Rached Ghannouchi a qualifié l’attaque de « crime organisé exécuté par des ignorants et des criminels », déclaration ironiquement faite en marge d’un congrès sur l’Etat civil dans les pays arabes. Au lendemain de chaque attentat de ce type, les sondages montrent que c’est l’islam politique dans son ensemble qui en pâtit.