Mohamed Bouzaidi : « Goudronner la route des marocains aux Etats-Unis »
A New York, cet entrepreneur dirige une société de télécommunications, Patriot IT & Security. Depuis 2009, il développe également des panneaux solaires (une filiale vient d’ouvrir à Casablanca), quand il n’aide pas ses compatriotes outre-Atlantique
Quel a été votre parcours jusqu’à votre arrivée à New York ?
Après des études secondaires dans ma région, proche de Fès, j’ai intégré l’école supérieure d’administration de Rabat. Ensuite, j’ai travaillé deux ans au ministère de l’Intérieur, avant de venir en France, à Paris 2, pour suivre un cursus en fiscalité et sur les perspectives d’intégration des pays du Maghreb. Puis je suis allé à New York, à l’aventure, afin d’avancer sur ma thèse de doctorat, en me disant : “Si tu n’arrives pas à réussir ici, tu ne peux réussir nulle part.” J’ai connu la véritable expérience américaine en travaillant dans un “car wash” (station de lavage pour voitures, ndlr).
Puis, très vite, vous avez commencé à vous lancer dans le business…
Oui. Il faut dire qu’aux Etats-Unis, c’est vraiment différent de la France. Au bout de six mois, là-bas, ils m’ont octroyé un prêt de 25 000 dollars (22 000 euros, ndlr), ce qui m’a permis d’acheter une limousine, puis une deuxième et une troisième. Afin de financer mes études, je faisais du transport de luxe grâce à des contrats signés avec de grandes chaînes télé (NBC, CBS). J’étais également fasciné par les télécommunications et le secteur bancaire. Ayant une formation financière, je me suis lancé. D’abord comme coursier, jusqu’à devenir vice-président d’une banque privée et partenaire à 50 % de celle-ci jusqu’en 2008. Là, j’ai vécu le désastre financier et j’ai tout perdu.
Comment avez-vous fait pour rebondir ?
En parallèle, j’avais monté en 2007 une entreprise de télécommunications, Patriot IT & Security. Lorsqu’il y a eu l’ouragan Sandy, en 2012, toutes les infrastructures de communication de la police de New York ont été détruites. Ils m’ont appelé pour mettre en ligne le centre de secours, ce qui a permis à ma société de se faire connaître. Avec le temps, j’ai formé mes techniciens pour qu’ils posent des panneaux solaires, j’ai vu l’opportunité dans les nouvelles énergies. Depuis 2014, nous avons mis en place un peu plus de 700 projets autour du solaire dans la région de New York.
Gardez-vous un lien avec le Royaume ? Des projets sont-ils en cours ?
Oui, bien entendu. Je m’y rends très souvent et je développe actuellement une filiale pour faire de l’énergie solaire à Casablanca. C’est un peu plus difficile qu’aux Etats-Unis, où il y a un statut légal qui encourage le développement du solaire. Au Maroc, nous sommes encore timides sur ce sujet. Aux Etats-Unis, il est possible d’investir dans le solaire et de vendre de l’électricité aux opérateurs à un prix déterminé ; au Royaume, pas encore, mais je suis optimiste pour l’avenir. Je développe également une instance à New York, destinée à aider et encadrer les nouveaux arrivants, mais aussi ceux au Maroc qui auraient besoin de conseils. Nous voulons goudronner la route pour la deuxième génération de Marocains aux Etats-Unis.