M. Qotbi : « Les lustres sont au Musée Batha à Fès »
Voici quelques jours que des médias électroniques marocains s’inquiètent de l’absence des « Grands Lustres » de la Mosquée Al Quaraouiyine de Fès. En effet, ceux-ci sont en restauration depuis 2014 et « auraient disparu » selon eux. De son coté, le président de la fondation nationale des Musées Nationaux, Mehdi Qotbi explique qu’ils sont au musée Batha à Fès et que leur retour ne saurait tarder.
L’affaire du Grand Lustre de la mosquée de Fès fait grand bruit. Des médias électroniques ont remarqué son absence prolongée et même parlé de disparition. Si tout le monde est d’accord sur le fait que l’objet a été restauré en février 2014 (Communiqué du ministère des affaires islamiques : « « les 2 lustres historiques de la Mosquée Al Quaraouiyine ont été retirés à des fins de restauration et que celle-ci est confiée au musée Al Batha à Fès »), certains présupposent que le lustre serait restée à Paris ou qu’il aurait disparu.
En effet, à l’automne 2014, le Grand Lustre trône à Paris. Dans la salle Napoléon du Louvre ! Le musée dirigé par Jean Claude Martinez et la Fondation Nationale des Musées du Maroc chapeautée par Mehdi Qotbi, ont mis en place une exposition « Le Maroc médiéval, Un empire de l’Afrique à l’Espagne » du 17 octobre 2014 au 19 Janvier 2015.
Inaugurée en grandes pompes par la princesse Lalla Meryem, et en présence des ex-ministres de la culture marocain (Mohammed Amine Sbihi) et français (Aurélie Filippetti), l’exposition sera un grand succès avec ses 170 000 visiteurs. Le lustre apparaît d’ailleurs dans le catalogue de l’exposition avec une table ronde le 1er décembre 2014 dans laquelle la restauratrice Isaure D’Avout doit intervenir sur la restauration des lustres monumentaux de la mosquée Al Quaraouiyine de Fès »
Les journaux électroniques soulignent qu’à cette date, personne ne sait où est le lustre de la mosquée. Nous avons également demandé des éclaircissements à Mehdi Qotbi, président de la fondation des Musées Nationaux :
Le Courrier de l’Atlas : Plusieurs journaux électroniques évoquent une possible disparition des deux grands lustres de la mosquée Al Quaraouiyine de Fès après l’exposition qui s’est déroulé au Louvre à Paris en 2015. Où sont les lustres actuellement ?
Mehdi Qotbi : Les deux lustres sont au Musée Batha à Fes. Nous attendons simplement de trouver les personnes qui vont les transporter car c’est très lourd. Pour l’heure, nous n’avons pas trouvé quelqu’un qui pourrait les transporter de Batha à la mosquée Al Quaraouiyine. Avec le Wali de la région, nous cherchons la possibilité d’une entreprise qui puisse faire l’affaire. Les rues sont étroites et il faut un stratagème qu’on n’arrive pas à trouver. On avait réussi à les emmener de Batha au Louvre mais on n’arrive pas à trouver la solution pour qu’ils repartent à la mosquée Al Quaraouiyine.
Le Courrier de l’Atlas : Vous nous confirmez bien que les lustres sont repartis du Louvre au Musée Batha de Fès ?
Mehdi Qotbi : Tout d’abord, ils ne sont pas partis du Louvre au Musée Batha. Du Louvre, ils sont partis à Rabat (au musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain du 5 mars au 3 Juin, ndlr) où ils ont été mis à la disposition du peuple marocain. Après l’exposition de Rabat, ils sont repartis au musée Batha. Ils y sont depuis ce temps-là, ça fait quelques années déjà. Il y a eu un échange de courrier avec le ministère des habous dans lequel nous les rassurions sur ces pièces ». Par la suite, Mehdi Qotbi nous a indiqué que le Wali de Fès lui a affirmé que le retour des lustres est "en cours" et "qu'il a donné son accord pour une entreprise".
Espérons dés lors que les lustres réintégreront leur place initiale après ces années d’absence.
Un Grand lustre ancestral
Situé dans la mosquée Al Quaraouiyine, première université du monde, créée par une femme, Fatima Al-Fihriya, l’objet fait partie du patrimoine national. D’un diamètre de 2 mètres 25 et de 1750 kilos (près d’une tonne trois quarts !!), il est une virtuosité de l’artisanat marocain de l’époque almohade. A la suite de la demande de l’imam Abdellah Benmoussa El Maalem, le calife de l’époque, Abou Abdallah Mohammad « An-Nasir » accepta de restaurer le lustre. Cela pris 17 ans de 1202 à 1219. L’ancien lustre Znati est restauré, refondu avec de l’argent et tous les artisans travaillent dessus. Cette restauration a couté 171 dinars et 2,5 dirhams, des sommes vertigineuses pour l’époque. Le lustre revient cher, notamment en huiles pour garder la mosquée allumée. Il faut en effet, 70 litres d’huile pour qu’il donne sa pleine puissance. Le sultan mérinide Abou Yacoub Youssef el Nasser décide de n’allumer le lustre que durant la nuit du destin (Laylat Al Qadr). On doit sa dernière restauration à Mohammed V qui l’électrifia en 1932 comme le prouve la plaque commémorative portant le nom du percepteur de l’époque Haj Abdelmajif El Jay.