74 500 détenus dans les prisons en France: un record

 74 500 détenus dans les prisons en France: un record

Illustration : Maison d’arrêt de Fresnes (Sud de Paris, France), c’est l’un des trois principaux établissements pénitentiaires de la région parisienne, et aussi l’un des plus importants de France. C’est aussi une prison touchée par la surpopulation carcérale, près du double de sa capacité initiale. Nicholas Orchard / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Le nombre de personnes incarcérées dans les prisons en France a atteint un record historique, dépassant les 74 000 au 1er juillet, selon les chiffres du ministère de la Justice. Cette tendance inquiétante devrait s’accentuer dans les semaines à venir, entraînant des conséquences dramatiques pour les conditions de détention.

 

Chaque mois, ou presque, amène son sombre record en France. Avec 74 513 détenus au 1er juillet, contre 73 699 un mois plus tôt, la France bat, pour la sixième fois en 2023, son propre record du nombre de détenus. Pourtant, officiellement, la France ne dispose que de 60 666 places dans ses établissements pénitentiaires. En dépassant ce seuil, la densité carcérale dans le pays s’élève à 122,8 %, contre 118,7 % à la même période l’année précédente. Dans certaines régions, comme à Perpignan dans le sud de la France, ce taux atteint même 212 %.

Malheureusement, la situation ne devrait que s’aggraver dans les semaines et les mois à venir. Les émeutes provoquées par la mort du jeune Nahel, tué par un policier le 17 juin, ont entraîné une vague de condamnations et d’incarcérations, qui ne sont pas encore toutes reflétées dans les statistiques officielles. Éric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, a révélé sur RTL le 19 juillet qu’un total de 1 278 jugements avait été prononcé en relation avec ces violences urbaines, dont 1 056 ont abouti à des peines d’emprisonnement.

 

D’autres records à venir

Ce durcissement du système judiciaire résulte d’une politique de réponse « ferme » et « rapide » à la criminalité, initiée par le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti. Plusieurs projets de loi visant à renforcer le cadre juridique pour certains crimes et délits ont été lancés, dont la dernière en date est la nouvelle loi antisquat, triplant les sanctions en cas d’occupation illégale d’un logement.

Dominique Simonnot, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), explique que l’utilisation accrue des comparutions immédiates est la principale raison de cette surpopulation carcérale. Selon elle, ces procédures accélérées conduisent souvent à des condamnations à des peines de prison, avec environ 90 % des jugements se concluant par une détention provisoire ou une incarcération ferme.

Cette surpopulation carcérale a pourtant des conséquences dévastatrices. Les conditions de vie en prison ont un impact significatif sur le taux de récidive des détenus après leur libération. Malheureusement, à mesure que les records tombent, les conditions de détention se détériorent. Dans certaines cellules, jusqu’à trois détenus se trouvent entassés dans un espace de seulement 4 m², avec environ 1 m² par personne pour vivre.

 

Conditions de détentions inhumaines

De plus, cette surpopulation entraîne des risques pour la santé, en plus des contraintes d’espace. Les matelas à même le sol deviennent la norme, tandis que les femmes détenues vivent également dans des conditions surpeuplées et insalubres. Cette situation précaire peut favoriser une culture de la violence et de l’instabilité dans les prisons, mettant en danger non seulement les détenus, mais aussi le personnel pénitentiaire.

En juillet, la France était une nouvelle fois pointée du doigt pour la gestion de ses prisons. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) l’a condamnée pour les conditions indignes de détention carcérale. Une condamnation consécutive à la saisie de la CEDH par trois détenus de la maison d’arrêt de Fresnes, soutenus par l’Observatoire international des prisons (OIP).

Face à cette réalité, des voix, dont celle de Dominique Simonnot, plaident pour une régulation carcérale, incluant des libérations anticipées lorsque la surpopulation atteint un certain seuil. Cependant, cette proposition se heurte à l’opposition du ministre de la Justice et du gouvernement, qui privilégient la construction de nouvelles places de prison.